Aujourd’hui plus que jamais: Si ce n’est pas maintenant, quand? Si ce n’est pas nous, qui?
- Lêgerîn 2
- il y a 6 jours
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L’Univers, l’Histoire et nous
Pour comprendre correctement la situation actuelle, nous devons comprendre correctement l’Histoire et pour savoir quoi faire, nous devons nous comprendre nous-mêmes; enfin pour nous voir nous-mêmes, nous devons à nouveau prendre conscience de l’Univers et de l’Histoire. Ce n’est qu’ainsi que nous serons capables de comprendre de manière juste ce qui se passe aujourd’hui et à quel point les moments que nous vivons forment l’histoire. En même temps, pour comprendre le rôle des jeunes et des jeunes femmes dans ce domaine, nous devons faire de ce principe notre boussole. C’est pour la même raison que les grands philosophes, prophètes et révolutionnaires, de Confucius à Zarathoustra et jusqu’au leader des peuples Abdullah Öcalan, ont insisté sur cette méthode pour comprendre pleinement la réalité dans laquelle nous nous trouvons. En ce sens, comprendre correctement ce qu’il se passe dans le monde ces derniers mois nous aidera également à clarifier la situation que nous vivons dans nos pays, dans nos communautés et dans nos propres vies.
Un scénario sombre
La troisième guerre mondiale qui fait rage aujourd’hui sur toute la planète est une guerre qui exprime la contradiction entre deux modernités idéologiquement opposées: celle de l’ennemi, que nous appelons la modernité capitaliste, et la nôtre, celle du peuple, que nous appelons la modernité démocratique. Depuis le début de la civilisation et du système étatique (il y a environ 7000 ans en Mésopotamie), ces deux modernités luttent l’une contre l’autre. La modernité capitaliste n’est apparue qu’après des milliers d’années de vie paisible et de coexistence dans la société ; et a commencé à se développer vers 5000 avant notre ère. Chaque empire, gouvernement ou individu doit être compris dans cette réalité dialectique. Les politiques de guerre, l’effacement des relations sociales, le démantèlement de la résistance culturelle : tout cela doit être analysé comme une attaque que la modernité capitaliste mène contre la société, et une attaque qui prend racine dans une longue histoire.
Les politiques de guerre du système: dissimulation et manipulation
Ainsi, si nous voulons saisir correctement ce qui se passe et les changements qui se produisent, nous ne devons pas nous laisser tromper par les médias du système ou par leurs outils de propagande. En fait, ce qu’ils essaient de montrer, c’est que la guerre qu’ils mènent n’oppose que des États, disons l’OTAN contre la Russie en Ukraine, ou par exemple Israël contre le Hamas en Palestine. Ou alors qu’aujourd’hui, Trump va déclencher une guerre économique contre le reste du monde en imposant des taxes et des droits de douane sur les marchandises entrant aux États-Unis, en essayant de montrer que les États-Unis n’ont pas besoin de l’infrastructure mondiale d’échange de marchandises qui est à la base du capitalisme financier. Ou encore, que la montée du fascisme n’est que le fait d’individus ou d’organisations isolées, comme Milei en Argentine ou l’AfD en Allemagne.
Mais ce n’est pas le cas : tous ces événements ne sont pas de véritables confrontations de forces opposées, mais seulement des petites manœuvres et ajustements mis en place par le système de la modernité capitaliste dans ses propres rangs afin de survivre et de continuer à dominer de la manière la plus efficace possible. Il est vrai que Trump ou Milei, dans leur style et leurs politiques sont plus brutaux et montrent ouvertement leur manière de dominer, et il est également vrai que la normalisation de leurs politiques oppressives peut avoir un impact sérieux et néfaste à long terme sur la société ; mais leur substance n’est finalement pas différente de celle d’autres acteurs étatiques plus « progressistes ». La substance de cette guerre, la véritable contradiction, est celle qui est menée contre la société, qui a lieu entre le capitalisme (et ses facilitateurs de quelques partis que ce soit), et la société dans son ensemble, et dont nous pouvons clairement voir les effets sur les jeunes, les femmes et les peuples.
Le libéralisme et l’attaque contre la jeunesse
Cette guerre, menée contre la société, l’est aussi au niveau idéologique. L’arme de la modernité capitaliste est le libéralisme. De quoi s’agit-il? C’est une idéologie qui veut détruire la capacité d’auto-organisation et d’autonomie de la société afin d’imposer une politique d’oppression, de violence et d’exploitation, de sorte que la société ne puisse pas répondre aux attaques du capitalisme. Que cherche à faire le libéralisme? Avant tout, il détruit la culture et l’histoire de la société, la rendant ainsi homogène, répétitive et sans racines. Nous pouvons voir par exemple de quelle manière le système manipule l’identité de jeune femme et de jeune homme et les relations qui leur sont imposées, des relations totalement façonnées par les conceptions patriarcales. En raison des caractéristiques sociales de la femme, le système vise à empêcher sa recherche naturelle de liberté en la poussant vers des formes plus libérales d’activisme. Dans le même temps, le jeune homme qui traverse une crise identitaire en raison de l’identité oppressive et la forme dans lesquelles il a été socialisé, cherche maintenant à s’en sortir et à trouver de nouveaux modèles. Cependant, le système manipule et réoriente sa quête vers des idées et des modèles réactionnaires tels qu’Andrew Tate ou Elon Musk, qui utilisent les réseaux sociaux et médias comme une arme. Cette tendance se retrouve également dans les statistiques de participation aux dernières élections, comme en Allemagne où les jeunes femmes préfèrent les partis de gauche plus libéraux, tandis que les jeunes hommes votent en grande partie pour les partis d’extrême droite.
Lumière dans l’obscurité
Dans l’obscurité que la modernité capitaliste tente d’imposer par la violence, les guerres et l’oppression, nous avons été témoins, le 27 février, d’un événement ayant le pouvoir d’éclairer à nouveau notre chemin vers la liberté. Depuis la prison d’Imrali, où Abdullah Öcalan est détenu et torturé depuis 26 ans, un appel et une opportunité historique nous sont parvenus. Nous tenons à le souligner clairement: il ne s’agit pas d’une évolution qui ne concerne que le Kurdistan ou la Turquie. À la base de cet appel, il y a la volonté de changer la manière dont le PKK s’est organisé jusqu’à présent, et celle de faire avancer une nouvelle initiative de paix avec l’État turc. Mais ça ne s’arrête pas là, nous devons comprendre cette tentative dans une perspective bien plus large. Ce que le leader Apo (Abdullah Öcalan) essaie de faire, c’est une tentative radicale de mettre en avant un modèle qui pourrait fonctionner comme une alternative viable pour tout le Moyen-Orient et pour le monde entier. Aujourd’hui, au Moyen-Orient, les différentes forces de la modernité capitaliste tentent, pour servir leurs intérêts, d’imposer leurs propres alternatives à la société. Qu’il s’agisse du projet de l’Iran et le Hezbollah, de celui d’Israël et l’OTAN ou de celui des Frères musulmans et de la Turquie. Ils se combattent, ils se qualifient des pires mots les uns les autres, mais ils servent le même système de domination de la société. Face à toutes ces forces, le projet de modernité démocratique et son modèle de confédéralisme démocratique s’opposent comme seule alternative réelle et radicale. C’est ce que le leader Apo tente de faire aboutir avec le processus qu’il a commencé. En ce sens, les tentatives des Druzes et des Alaouites en Syrie qui vont dans le sens de l’autogestion, sont significatives et ensemble avec les Kurdes et toute la population, elles détermineront l’avenir possible d’une Syrie démocratique.
La lutte pour le socialisme
L’idée du socialisme est au cœur de cet appel et du processus de transformation lancé par le Leader Apo. Le socialisme signifie être-société, le socialisme signifie l’organisation du peuple, travailler et marcher avec le peuple. L’influence du socialisme réel, qui a touché tous les mouvements révolutionnaires du XXème siècle, y compris le PKK, a finalement créé un socialisme qui a servi et en réalité intensifié la modernité de l’ennemi. À l’inverse, le leader Apo tente une fois de plus de faire de l’organisation de la communauté, du peuple et de la société, conformément à leurs propres modes d’existence naturels et originaux, la base de la lutte. C’est ainsi qu’il revient à la véritable essence du socialisme, à savoir l’auto-organisation de l’humanité afin qu’elle puisse continuer à exister. Ainsi comprise, l’organisation (en tant que verbe et en tant que pratique) devient aussi importante pour la société que le pain, l’eau et l’autodéfense.
Quelques semaines plus tard, lors d’une marche de la jeunesse du Kurdistan du Nord, un message d’Öcalan a de nouveau été diffusé. La question de l’organisation est au cœur de ce message. En tant que Jeunesse Internationaliste, nous pensons que la question de l’organisation est cruciale: c’est le moteur de la transformation et de la réalisation d’un mouvement de jeunesse plus stable et à long terme. Un mouvement capable de catalyser le moment d’activisme et de révolte, en une situation durable d’auto-administration démocratique et d’auto-gouvernement.
En organisant tout notre environnement, à commencer par nos écoles, nos universités, nos familles, nos amis, nos lieux de travail, nous pouvons augmenter considérablement nos chances de réussite!
La lutte continue
Bien entendu, l’appel a eu un impact qui s’est rapidement fait sentir dans toute la région. Au Kurdistan et en Turquie pour commencer. D’un côté, au Rojava, on tente maintenant de mettre en œuvre l’appel en établissant un rôle permanent de l’Administration Autonome dans la création de la nouvelle Syrie. Dans ce sens également, la lutte du peuple et des FDS avec la résistance de près de 100 jours contre les gangs djihadistes sur le barrage de Tichrine, est la preuve la plus claire que l’organisation du peuple peut devenir un facteur clé également contre les forces hégémoniques qui tentent de définir le Moyen-Orient. Mais il n’y a pas qu’au Moyen-Orient que la lutte s’intensifie. En Serbie, un vaste mouvement populaire conteste la politique antidémocratique du gouvernement. Les jeunes mènent également une lutte au Baloutchistan pour le succès de l’auto-organisation de leur peuple. Ou encore en Amérique latine, où la jeunesse zapatiste mène une résistance culturelle, en organisant des événements internationaux dans le domaine des arts et de la culture.
Organisez-vous, suivez la voie qui a été ouverte, faites réussir la révolution!
L’éducation, l’organisation et l’action, sont les outils de la lutte que nous devons mener de manière plus radicale et autocritique aujourd’hui. Les politiques démocratiques, l’idée d’auto-organisation et l’éducation sont certainement les remèdes les plus puissants que nous puissions trouver lorsque nous repensons les nécessités de notre lutte contre le libéralisme et la modernité capitaliste. L’éducation, en tant que base de la lutte contre les mentalités patriarcales, oppressives et destructrices de la modernité capitaliste, jouera un rôle décisif dans nos organisations.
En guise de conclusion, nous tenons à dire que le chemin a été tracé devant nous, et que c’est maintenant à nous de choisir de l’emprunter. Si nous sommes capables de faire les bons pas vers la démocratie et la liberté, alors nous serons capables d’atteindre des jours meilleurs pour toute l’humanité. Le capitalisme nous pousse sur la voie de l’extinction et de la misère, que nous le voulions ou non. Choisir la voie de la liberté est la question que l’on doit se poser, et nombreux sont ceux qui empruntent déjà cette voie. Aujourd’hui plus que jamais, nous nous souvenons des jeunes de la Révolution de 68 et de leur slogan : « Si ce n’est pas maintenant, quand ? Si ce n’est pas nous, qui?»
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